Le Fourchon ou Arbonnoise
Au-delà de la Planche à Quesnoy, la Deûle, se divisait en deux branches. Celle qui pénètre à droite, après avoir traversé Esquermes, faisait tourner les moulins de Wazemmes, au lieu dit Rouge Porte, à l’intersection du boulevard Vauban et de la rue Nationale*, puis elle coulait dans les prairies qui faisaient partie du château de l’évêque de Tournai, laissait ce château, l’église de la paroisse et la cense St Nicolas à droite, et faisait tourner le moulin Del Saulch. Il entrait ensuite dans la ville derrière le Palais de Rihour, dont il alimentait les fossés, il activait le cours des différentes rivières intérieures et tombait enfin dans la Basse-Deûle.
C’était là le lit primitif de la Deûle qui n’avait pas à cette époque l’allure calme que nous lui connaissons de nos jours. Le Fourchon était alors, qui le croirait ? une sorte de torrent, et son cours rapide lui avait creusé un lit dans la craie jusqu’au niveau de l’affleurement des sources naturelles Souvent, dans les crues subites d’hiver , le fleuve minuscule débordait et inondait les champs voisins. Une tempête dans un cours d’eau ! On ne s’attendrait pas à rencontrer un torrent à Wazemmes et à Lille. C’était probablement le seul de Flandre.
Un grand amateur de choses lilloises nous a raconté dans des pages intéressantes les parties de plaisir de sa jeunesse, le long des cours d’eau de Wazemmes. « Jolie promenade de l’Arbonnoise ! Que de gentils souvenirs tu nous rappelles ! Tes eaux claires et limpides, tes rivages verdoyants et fleuris, tes ombrages, les cygnes nous poursuivant d’une manière menaçante et agressive, lorsque nous approchions trop près de leur retraite, tes pêcheurs lançant l’épervier ou piquant de leur trident les anguilles endormies dans la vase, nos promenades en flottille, nos barquettes chargées de jeunes gens gais comme des pinsons !...** »
Il ne reste rien de ces belles promenades d’antan, rien, sinon un poétique et regretté souvenir !
* Sur la place du maréchal Leclerc, on a retrouvé beaucoup de blocs de craie qui étaient évidemment apportés. C’était l’emplacement d’un ancien gué. On y a recueilli de nombreuses pièces de monnaie.
** extrait de Souvenirs lillois de Louis Legougeux.
extrait du livre de l'abbé Salembier (1912)
Le Fourchon